ÉDITORIAL
« Tout bien portant est un malade qui s’ignore » (Knock, Jules Romains)
Le confinement de tous, partout et en tout temps, sans distinction est une immense connerie. Des vieux hors-CLSC d’abord (130 000 personnes quand même), mais surtout des 15-40 ans (les jeunes), qui ont objectivement à peine moins de chances de mourir dans un accident de la circulation (0,12 % en voiture) que de la CoVid-19 (0,2 % jusqu’à 39 ans).
Au nom de la santé de tous, on a pris des décisions sans nuances, déresponsabilisant les individus et les communautés par rapport à la pandémie, comme si nous ne pouvions pas exercer notre jugement en la matière. En France, où le confinement est total et obligatoire sous peine d’une contravention de 135 euros, certains promeneurs ont été punis pour être sortis en promenade sur une plage déserte, ou des randonneurs solitaires à 1300 mètres d’altitude sur le Mont-Blanc.
Quitte à prévenir la mort, mettons le paquet dans les CLSC, mais pourquoi enlever aux individus toute dignité, en leur refusant les sorties à leurs risques ? En d’autres circonstances, nous accuserions le milieu médical d’acharnement thérapeutique… Je pense m’être déjà exprimé plusieurs fois au sujet du choix à mourir. Décider de notre vie est un droit humain fondamental, qui ne fait franchement pas le poids face au droit à la santé. Ce dernier est un moyen pour être heureux, pas une finalité.
Comme le disait André Comte-Sponville récemment : « Laissez-nous mourir comme nous le voulons ». Dans l’entrevue qu’il a donnée au magazine Le Temps il y a quelques jours, il qualifie la réaction des états dans la crise pandémique actuelle comme sympathique, a priori : vouloir sauver tout le monde parait louable. En fait, c’est non seulement absurde, mais dangereux. En effet, les gens continueront à mourir, et de toute autre cause que du Coronavirus ! D’ailleurs, à 68 ans, il se dit lui-même davantage effrayé par Alzheimer. Il aurait encore 95 % de chance de réchapper au virus s’il le contractait.
Non, ce qui le fâche, c’est que les jeunes payent le gros prix pour « sauver » (et on voit comment) une population minoritaire. C’est dur à entendre, mais c’est la vérité. Ces mêmes jeunes qui n’étudient plus, perdent leur travail, leur entreprise, s’endettent massivement et ne créent plus la richesse qui doit financer lesdits soins de santé. Ces mêmes « jeunes » vont payer pour une maladie dont les victimes ont en moyenne 81 ans.
Et personnellement, une sorte d’anxiété me gagne, lorsque je pense à tout cet argent annoncé : d’où sortira-t-il ? Comment allons-nous le rembourser, alors que nos gouvernements n’ont déjà pas le courage d’aller le chercher dans les paradis fiscaux, les entreprises multinationales style GAFA ou dans les échanges financiers spéculatifs de la bourse ?
À ce compte-là, déchirons nos chartes, nos déclarations universelles et au nom de la santé universelle, soyons surveillés 24 h sur 24 h et 7 jours sur 7. Pour notre bien. Et ne croyez pas que je me place du côté de ces manifestants américains de droite défendant à tout prix leurs libertés individuelles. Je dis simplement qu’il y a eu un moment pour le confinement, c’est maintenant le moment d’utiliser les données scientifiques colligées et d’agir rationnellement. Pas parce que nous avons peur - nous sommes mortels - rien n’y changera. Faisons plutôt avec.