La controverse de la SAQ prend un viniculteur d’Aylmer par surprise
Laurent Robillard-Cardinal
Le monde du vin est dans une mauvaise passe après qu’un groupe, à la mi-mars, a intenté une poursuite contre des producteurs de vin de la Californie à cause de soi-disant niveaux excessifs d’arsenic dans leurs vins. Du coup, la SAQ, qui compose déjà avec des attaques provenant des médias concernant la vente de vins importés en vrac, a été accusée, par certains consommateurs, de vendre les vins impliqués dans cette poursuite.
Ces rapports des médias ont surpris Raymond Huneault, un viniculteur d’Aylmer qui fabrique du vin depuis 1999. « J’aime travailler avec les laboratoires de la SAQ. Je fais habituellement affaire avec le même chimiste et, bien qu’il soit sévère, il est bon. Quand nous discutons par téléphone, il me vient en aide », a-t-il confié au Bulletin.
Avant que les consommateurs puissent mettre la main sur ses vins et cidres « Clos Baillie », ou tout autre vin vendu dans la province, le produit doit passer les tests du laboratoire de la SAQ. Alors que le processus est rigoureux et demeure le seul moyen pour un producteur de vin d’entrer sur le marché québécois, M. Huneault en est bien content. « Avant de l’embouteiller, je l’envoie au laboratoire de la SAQ qui vérifie tous mes échantillons pour s’assurer de leur conformité et qu’ils sont exempts de toute substance qui pourrait occasionner des problèmes de santé. Le laboratoire vérifie plusieurs éléments, incluant l’arsenic. Parfois le chimiste me dit que je dois changer quelques affaires », ajoute M. Huneault dont les commentaires renforcent le message de la SAQ.
La SAQ informe que son laboratoire teste plus de 10 000 échantillons par année pour plusieurs substances. « La SAQ se conforme aux normes fédérales de concentration maximale d’acceptabilité d’arsenic dans les jus, les nectars et les boissons; ces normes sont fixées par Santé Canada à 0.1 parties par million », rapporte la SAQ. Si un produit excède certains niveaux, il est refusé. « Nous en utilisons le moins possible, même des pesticides organiques », fait remarquer M. Huneault. Même les pesticides organiques, tels que le souffre et le cuivre, ne sont habituellement pas répandus sur les vignes avant la récolte.
D’autres substances peuvent être présentes dans le vin lors des processus de clarification et de stabilisation. « Certains processus de clarification du vin peuvent causer un danger. Nous clarifions le vin aussi naturellement qu’il est possible », ajoute M. Huneault. Clos Baillie privilégie le processus le plus naturel soit le soutirage. « Pour que l’acide tartrique se retrouve au fond, j’utilise ce qu’on appelle la stabilisation à froid; de plus, je filtre le vin, mais pas trop. Ce qui se passe en ce moment c’est que certains producteurs de vin clarifient leurs vins au moyen de blancs d’œufs ou de produits de poissons; mais les producteurs doivent l’indiquer sur leurs étiquettes. D’autres utilisent des substances chimiques pour clarifier leurs vins. »
Selon M. Huneault, les producteurs de vins ressentent une pression provenant des consommateurs nord-américains pour la clarification de leurs vins. « En Europe, les gens sont habitués à ce qu’il y ait un peu de résidu dans leur vin et ils l’acceptent », fait remarquer le viniculteur d’Aylmer, « Il s’en suit que les producteurs en France ne clarifient pas leurs vins autant (et les substances étrangères ne sont pas évidentes). Si vous clarifiez trop votre vin ou encore passer trop de temps à le filtrer, il goûtera l’eau. Il n’aura pas de caractère. »
Les résidus que l’on retrouve normalement dans le vin sont soit le tartare, présent dans plusieurs produits, ou la levure. Tous deux sont inoffensifs, dit M. Huneault, « Les consommateurs devraient s’informer le plus possible afin de prendre des décisions éclairées », ajoute-t-il.