ÉDITORIAL
L’indiscipline
Il y a quelques jours en France, 198 manifestations ont eu lieu pour protester contre le « passe sanitaire », voire contre la vaccination obligatoire (à partir de mi-septembre, les employés du réseau de la santé devront être intégralement vaccinés contre la CoVid-19 sous peine de rester chez eux). 240 000 manifestants, dont 17 000 juste à Paris. Une semaine avant, c’était 40 000 de moins, et encore 40 000 de moins fin juillet. Ici au Québec, la dernière trace que j’ai trouvée d’une manifestation notable date de début mai dernier : 30 000 personnes à Montréal contre les mesures sanitaires. C’est considéré comme un événement « monstre », car il faut se rappeler qu’il y a 65 millions d’habitants en France, contre moins de 8 millions au Québec. Toute proportion gardée, les chiffres correspondent finalement.
Toutefois, cela m’a amené à réfléchir un peu. Évidemment, nous pourrions nous intéresser aux causes de ces manifestations. Dans les deux cas, ce sont les mesures prises pour lutter contre la propagation de la CoVid-19. Et pas n’importe lesquelles. En France, il s’agit de la « Loi relative à la gestion de la crise sanitaire », notamment sur l’obligation de présenter un « Passe sanitaire » pour accéder à différents lieux, en particulier publics, comme les cafés-restaurants, les cinémas, et autres lieux de divertissement… Il y a trois mois, les Québécois protestaient contre l’obligation des mesures telles que le port du masque, la distanciation obligatoire ou le couvre-feu. Que feront-ils quand nos gouvernements, municipal provincial ou fédéral, vont évoquer le « passe », ce qui ne va pas manquer d’arriver ? Car tous crient au loup en scandant le même genre de slogan autour de la notion de liberté. Il serait intéressant de voir ce qu’ils répondent quand on leur parle du droit des personnes à avoir accès à un environnement sain et à des soins médicaux. Parce qu’ils constituent un risque supplémentaire d’extension du virus, qui, par ricochet, peut entrainer plus d’hospitalisation et une plus grande mobilisation de personnel médical, qui sinon, seraient affectés à des gens malades, en attente de chirurgie, etc. Beaucoup d’actes médicaux ont été retardés ou annulés à la suite de la pandémie ; certains en sont morts… Tout cela sur fond de pénurie d’infirmières ou de médecins. Pas très solidaire…
Non, ma réflexion a surtout porté sur le tempérament des Français par rapport à celui des Québécois en matière de comportement social. On sait les Français râleurs et prompts à exprimer leur mécontentement dans la rue, dans des manifestations, doublées le plus souvent de grèves ; ce n’est pas nouveau et cela ne s’est jamais démenti. C’est presque un sport national. J’ai moi-même participé à mes premières grèves et manifs à 14-15 ans, quand j’étais encore au secondaire. Les Québécois, surtout francophones, ont un peu de cela dans leur ADN modifié, il faut le reconnaitre. Par contre, si l’on revient aux mesures sanitaires, dans la rue, la différence est flagrante. Par exemple, bien que le masque soit obligatoire à l’extérieur, dans les centres-villes, dans la majorité des villes française, à peine la moitié des personnes le portent. On a plutôt l’impression que les touristes sont plus obéissants que les Français eux-mêmes. On retrouve -là une résistance en acte, un esprit de contradiction très français. Et franchement, ce n’est pas particulièrement rassurant en ces temps troublés. Espérons que les Québécois se montreront plus disciplinés.